L E O F A N Z I N E O Q U I O M E T O L A O C U L T U R E O E N O S A C H E T S

18.8.11

I (still) Want The Sun

L'été, il y a les grands raouts et puis il y a les autres. Inutile de préciser auxquels va ma préférence. Attelons-nous donc d'office à un exemple concret : soit le Nox Orae. Sis au bord du Léman, à la Tour-de-Peilz à côté de Vevey précisément, ce tout petit, tout jeune festival en est à sa deuxième édition. L'an passé déjà, on s'était pas mal extasiées sur la soirée cool que ç'allait être (et a effectivement été). Cette année, comme dit, l'association ATAC et le RKC ont remis le couvert, en doublant les bouchées. Étoffée d'une seconde soirée, l'affiche faisait la part belle aux exclusivités suisses (3/8 noms) ainsi qu'aux artistes locaux (4/8). Un week-end à ne pas manquer. On était au taquet.

LE FESTIVAL DES MUSIQUES ACTUELLES 2011
(avec des photos Anh Phi / Voluume.fr )

Samedi - Forever Connan Love
Premier jour sur la Riviera, on a goûté au soleil et à la plage - petits plaisirs simples de la vie avant les concerts, ça passe crème. Puis le festival a ouvert ses portes et Wolf & Rhino ont ouvert la marche. Ils n'ont pas vraiment convaincu, car si leur demo passait encore, le résultat sur scène s'avérait plutôt ennuyeux. Les quatre gars, trop gavés de Pink Floyd pour parvenir à s'en dépêtrer, ont donné l'impression d'une jam interminable et on s'est vite lassés, surtout qu'il n'y avait pas de chant. Pas que ce soit une condition sine qua non, mais 'faut pas abuser non plus. Par la suite, le suisse-allemand Fai Baba (qu'on avait pu découvrir sur la cassette Summer Hits, l'été passé) a d'ailleurs prouvé qu'il est possible de s'éterniser sur une session de quelques accords lorsque l'on entrecoupe la chose en chantant, hurlant presque, la rage au ventre. On aime mieux ça.
Ensuite venait la bonne surprise de la soirée. Merveilleuse surprise devrais-je même dire. Car on s'attendait à un truc mou du genou. Trop pas. En fait, Connan Mockasin est non seulement trop adorable, il joue aussi très bien sur scène. Sa voix transgenre, son jeu de guitare atypique, ses compositions oniriques, d'excellents musiciens en accompagnement et une bonne alchimie avec le public ce soir là ont fait du concert un moment privilégié. Déjà, on était super bien dès le premier morceau, puis le deuxième ("It's Choade My Dear"), puis le troisième, puis... on en pouvait plus, au final, quand il a commencé "Forever Dolphin Love", en nous invitant à chanter avec lui "ah ah ah ah ah ah" aaaaaaaaaah. C'était tout beau. Et le mieux c'est qu'après, il ne pouvait se résoudre à quitter la scène, entammant un dernier morceau dans lequel le batteur s'est lancé au pied levé et que le public était censé reprendre en chœur. Mais il faut bien l'avouer, soit on était trop charmé pour sortir des sons corrects, soit les gens sont vraiment nazes, parce que ça ne donnait pas incroyablement bien.  Malgré tout, Connan a dit qu'on était un super public et est reparti avec un sourire plus grand que lui. On me murmure à l'oreille qu'il serait tombé amoureux de Vevey. Vraiment trop mignon.
Avec du recul, on aurait préféré en rester là et garder pour la nuit des petites étoiles dans les yeux. Mais non, Crystal Stilts sont venus tout gâcher. La faute au réglage foireux du son, qui rendait la voix de Brad Harget quasi inaudible? A moins que ce ne soit le groupe lui même, qui, à l'exception du mec au synthé (un "home-made" parait-il) montrait trop peu d'enthousiasme pour être honnête ? Grosse déception pour ma part, surtout quand ils massacrent "Shake the Shackles" qui est quand même une de mes chansons préférées. Ils tournaient en rond et on s'est enfuit.




Dimanche - Smalltown Boy et Pluie
Rebelote, pique-nique, plage, baignade et tout le tralala - La vie. Sauf qu'au bout d'un moment, les nuages gris se sont fait sérieusement menaçants, se lâchant dès le deuxième concert de la seconde soirée. Avant cela, on a quand même eu le temps d'apprécier pleinement le set de Buvette, affalés sur des transats face à la scène. Je ne sais pas trop ce que ça fait, quand on joue, d'avoir un petit parterre de gens assis ou couchés qui hochent un tout petit peu du chef. J'imagine que ce n'est pas forcément très encourageant. Mais Buvette n'avait pas l'air de s'en faire du tout et ce concert fut, à mon sens, l'une de ses meilleures prestations. En effet, il semble qu'il a gagné en assurance. Son nouveau tube "Inner Wars" fait très plaisir et, surprise, en plein milieu du concert, KurzWelle l'a rejoint (escaladant la scène côté public, le plus normalement du monde). Ils ont joué un morceau composé ensemble dans la semaine qui précédait le Nox:
A leur suite, un gros chien a débarqué sur scène avec pour dessein d'annoncer Labrador City, c'était golri. Et puis il faut dire aussi que le set bien pop des Bernois était franchement bienvenu. De vraies  petites chansons aux contours bien nets comme découpées à l'emporte pièce, ça n'était pas de refus. "Feather", leur tube, en est une bonne illustration. (On vous conseille vivement de mater la vidéo si vous ne savez pas à quoi ressemblent les montagnes suisses pendant l'été. Même qu'on y a repéré des briques de jus d'orange de la Migros. Le folklore tavu). Bien que pas révolutionnaires pour un sou, Labrador City a suffit à égayer l'atmosphère pluvieuse de la fin d'après midi. Et en gentils petits barbus à chemise à carreaux, ils ont même offert un de leur vinyles au seul (ou presque) type debout dans le public. De tous les petits suisses, ils étaient de loin les plus chous.


Suivait le set très attendu des 4 meufs d'Electrelane. La formation, en route pour la première fois depuis sa séparation en 2007, était précédée d'une solide réputation de bête de scène. Force est de constater que les anglaises gèrent, effectivement. En particulier la guitariste Mia Clarke (cette meuf est parfaite) ainsi que Verity Susman, qui déguaine le saxo pendant "Only One Thing Is Needed". A la fois prenantes voire parfois touchantes, elles souriaient souvent un peu timidement, comme si on était vraiment trop gentils de les apprécier et, tout comme Connan le jour précédent, elles avaient l'air franchement heureuses d'être là. Un détail qui fait toujours plaisir à voir. Elles ont joué pas mal de Power Out ("On Parade", "This Deed") et surtout, ont livré une admirable reprise de "Smalltown Boy" avant de terminer le concert dans un magma de grincements de guitare, d'accords frappés sur le clavier et de secousses de cheveux. On en est ressortis à peine assommés, pas vraiment en phase pour la clôture qui incombait au compositeur canadien Destroyer, accompagné de ses sept musiciens. Oui, sept musiciens pour un résultat parfois un peu confus. Comment voulez-vous qu'un saxophoniste, un guitariste et un trompettiste s'entendent dans une apparente phase d'improvisation ? Dan Bejar, s'enfillant bière sur bière n'était en tout cas pas là pour les raccorder. Mais bon, dans l'ensemble, c'était plutôt plaisant. Une espèce de méli-mélo-lounge-fusion ("une porte qui s'ouvre sur de la lumière" avons nous entendu dire lors d'un débat des plus absurdes à la gare) assez agréable pour qu'on en redemande à grand cris. Mais peut-être était-ce par dépit, car la fin du festival est arrivée franchement trop vite.

Nox Orae Hipsters Festival <3
Météo peu clémente, bilan de concerts contrasté, faible affluence - les défauts de cette deuxième édition du Nox Orae tiennent en une liste de trois points. Mais qui s'en chaut ? A l'heure du retour, le dernier, celui qui fait toujours un pincement au coeur, nous affrontions la pluie torrentielle avec pour seule protection un linge offert par le bassiste de Destroyer. Nous avions bien de la peine à croire que, quelques heures auparavant, nous nous baignions dans le Léman, tout réjouis d'être ainsi rafraîchis. Il n'y avait pas lieu de se plaindre, au contraire, tout juste de quoi sourire d'un air un peu fatigué. En effet le Nox, de part sa situation idéale au bord du Lac, sa programmation pointue et son atmosphère agréable, a énormément pour plaire:
1. Avec son gros lâché de triangles, l'affiche était bien jolie et ne trompait pas sur la nature de l'événement que l'on fréquentait. Déclinée en un tas de jolis flyers, jolis livrets, jolis bracelets et jolies banderoles habillant les côtés de la scène - bravo hum-hum.ch - t'avais de quoi te créer une collection à brandir à la face du monde pour prouver ton bon goût.
2. La musique entre les concert était cool aussi ("Fred Vom Jupiter", "Europe Endless" et de la Rowboat Vol. 5, entre autres - bravo Pat.V.) et tu pouvais shaker ton booty en toute impunité. Méga bonus à l'indie cred si tu reconnaissais plus de 50% des titres qui passaient.
3. Les gens étaient gentils et détendus. Ca ressemblait un peu à l'image que je me fais du Field Day, la bouffe, le carrousel, Londres en moins. Un rassemblement d'hipsters dans un joli parc, en somme. Il faut dire aussi qu'au vu de la mini-taille du festival, on accédait sans encombre à la place de son choix, et on se retrouvait quasi en tête à tête avec les groupes et tout cela était fort appréciable.
4. Il se passait des trucs rigolos, genre une fille a volé la flûte traversière au concert de Destroyer. Et Connan sait faire glisser sa tignasse de haut en bas sur son front.


Reste que peu (trop peu) de monde a répondu à l'appel (on voyait bien le problème lorsque pour Destroyer, il n'y avait plus que deux rangées agglutinées au plus près de la scène pour échapper à la pluie). D'ailleurs, il parait que la manifestation a fini dans les chiffres rouges. Alors quoi ? Le Nox Orae mérite de se défaire de sa quasi-confidentialité. En effet, une affiche, même petite, mais pointue vaut tous les gros raouts du monde. Au Nox Orae de s'affirmer alors comme un de ces rendez-vous qu'on ne peut pas rater. Un petit dating intimiste avec des artistes en exclusivité suisse. Une perle bariolée sur la Riviera. Un chouette festival avec un nom en sept lettres, un peu comme j.e.t.a.i.m.e. Il le mérite bien.