L E O F A N Z I N E O Q U I O M E T O L A O C U L T U R E O E N O S A C H E T S

18.8.12

Route du Rock, mon coeur brûle telle une crêpe flambée pour toi

 En 2009, j'étais jeune et mignonne et rentrais très enthousiaste de ma première Route du Rock. J'avais écrit pour l'occasion une liste de vingt-deux bonnes raisons de retourner à la RDR pour les éditions suivantes. Trois ans plus tard, en relisant cet article, je me dis que j'enlèverais peut être les références aux mignons petits Anglais, parce qu'ils sont généralement trop bourrés et assez chiants, mais je pourrais écrire bien plus de vingt-deux bonnes choses sur ce festival. Désolée, mais ce n'est toujours pas en 2012 que vous m'entendrez dire du mal sur le grand évènement annuel de Saint-Père Marc en Poulet. 

LA ROUTE DU ROCK 2012
vendredi

C'est un peu bête de commencer par le meilleur, mais c'est ce qu'il s'est passé, le vendredi était au-dessus des autres jours, niveau concerts. 

Ces quatre petits anglais (pas ceux ivres morts du camping) à l'air gentil et qui n'ont pas compris que le triangle était passé de mode depuis l'été 2010 ont assez buzzé ces derniers mois pour que certains s'offusquent qu'ils soient programmés si tôt dans la journée. On se calme, ça reste un jeune groupe qui vient de sortir son premier album, il est très bien placé dans la grille horaire. Justement, ça fait une mise en bouche sympathique. Ils sont surtout connus pour ce tube, "Breezeblocks" qui, tout compte fait, après l'avoir entendu en live, est plutôt bien. Bon, ce n'est pas fou non plus, ça fait drôlement penser à un Foals nouvelle génération, avec un chanteur qui a une voix proche de celle de Charlie Fink de Noah & The Whale, en moins douce. 

C'est beaucoup trop peace pour moi. Tous ces gens qui s'aiment et qui font des chansons joyeuses et bucoliques, c'est chaud. Quand j'arrivais à me concentrer un peu, je remarquais que les mélodies étaient jolies quand même, mais bon. Ce qui m'a le plus marquée, c'est l'accent québécois du mec, qui m'a rappelé le fait qu'il faut absolument que je me reregarde les trois films de Xavier Dolan. 



Dominique A
J'aimerais juste comprendre pourquoi ils invitent tout le temps ce gus à la RDR. 

Spiritualized
Ce moment pourrait sérieusement concourir au titre de meilleur concert du festival. Jason Pierce, affublé de ses fameuses lunettes, tout de blanc vêtu et bien caché à l’extrémité droite de la scène, a délivré un set magnifique du début ("Hey Jane") à la fin, et l'heure est passée sans que l'on s'en aperçoive. Le plus beau moment était l'enchaînement "Mary" (à donner des frissons, carrément) / "Ladies and Gentlemen We Are Floating In Space", parce qu'on préfère les morceaux calmes à ceux un peu plus rock. D'ailleurs, le concert a prouvé que Spiritualized s'était toujours plus éloigné du space rock, et rapproché de la soul. Il y avait même deux choristes de gospel, et elles étaient, heureusement, nettement plus sérieuses que les trois clowns qu'on a pu voir au concert de Girls à la Villette Sonique

J'ai enfin compris ce qui me gênait dans ce groupe que tous mes amis adorent : le problème, c'est qu'ils ont trouvé de super bonnes idées d'intro, mais ils ont décidé que c'était suffisant pour en faire des morceaux entiers en les rejouant sans cesse. Et puis leur son est inutilement sale. Sur certaines chansons, c'est vraiment chiant. Leur mélange guitares / gros beats est intéressant parfois, mais lassant rapidement.


Voilà le grand concurrent de Spiritualized pour la médaille d'or du meilleur concert du week-end. Ceci n'est certainement pas étranger au fait que j'ai passé des mois à écouter leur album sorti en 2010 et que leur set était plus qu'attendu de mon côté.On compare souvent le projet du californien Luis Vasquez à du Joy Division, à raison. C'est encore plus cold/new wave en live. Les sombres paysages déroulés prennent plus d'ampleur sur scène, donnent envie d’exécuter des danses étranges. Malheureusement, quelques rares chansons sont moins bonnes en concert que sur disque, l'entêtant "Circles" en  pâtit. J'attends surtout le prochain album, Zeros, qui est prévu pour octobre.

Je ne connaissais pas ce mec si ce n'est de nom, et sa discographie était tellement imposante que j'ai eu la flemme de m'y mettre. Il a commencé par des bruits de scie très angoissants, pour ensuite balancer une chanson bouffonne qui me faisait penser à un spectacle de clown. Je suis restée un peu plus, au moins pour admirer les effets visuels de son casque (arrêtez avec les robots dans l'electro d'ailleurs, pitié), parce que c'était plutôt bien ça. Mais je me suis vite rendue compte que j'étais aussi opaque au set de Squarepusher qu'à celui de son confrère de Warp qui était là l'année dernière, Aphex Twin

samedi

Après le bonheur de retrouver Saint-Malo et ses plages au soleil, on remballe pour la soirée qui a amené le plus de monde lors de cette vingt-deuxième édition. Il parait que ce serait lié à The XX.

Heureux malheur, My Best Fiend a annulé début juillet leur venue à la Route du Rock, et on a choisi Veronica Falls pour les remplacer. Ceci a d'ailleurs donné droit à une bonne boulette de la part de journalistes peu au fait de ce changement de prog. Le premier album de ces quatre Londoniens qui s'habillent vraiment comme des Londoniens est de la pop à guitares tellement mignonne que j'ai dû placer trop d'espoirs en eux. Leur concert était chouette, mais sans plus. La faute à un mauvais réglage de micro, un concert trop tôt, et un jeu de scène limité. Ce n'est définitivement pas un groupe taillé pour des scènes aussi grandes, mais ça, on aurait pu s'en douter.



Savages
J'ignore ce que faisait ce groupe ici alors qu'il n'y a qu'un titre, qu'un seul malheureux titre, "Husbands", disponible en écoute, et qu'en plus il est assez mauvais. On ne sait ce qu'il s'est passé dans la tête des programmateurs. Donc Savages est un groupe de goudous anglaises créé par la meuf de John & Jehn, ce duo de français expatriés que j'aimais bien jadis qui font du rock vaguement influencé 80s et franchement oubliable. La voix de Jehn est assez insupportable et elle reçoit un carton rouge pour son pantalon-jupe noir. Le moins bon concert du week-end, assurément.

Lower Dens
Comme son récent album Nootropics, le set de Lower Dens était inégal. Le groupe de Baltimore mené par une chanteuse qui en fait ressemble et chante comme un homme a un morceau génial, "Brains", une toute petite poignée d'autres bons titres, et pas mal de plages un peu chiantes. Mais globalement, ils s'en sont bien sortis, on n'a même pas baillé. 

The XX
La tête d'affiche du festival, s'il y en avait une, ne faisait pas trop saliver. The XX, je n'avais jamais réussi à écouter leur album d'une traite sans me lasser, trop calme, pas assez de relief. Et puis aux Eurockéennes de Belfort en 2010, l'engouement excessif du public avait achevé de m'énerver. Pourtant, incroyable mais vrai, ce fut un des meilleurs concerts du week-end à Saint-Malo. Leurs chansons qu'on trouvait ennuyeuses étaient ici très très belles, j'ai même senti des frissons me parcourir et ai cru devenir emo. Le trio remporte aussi le prix de la meilleure scénographie, avec ses vidéos abstraites de taches d'huile et le fameux X par dessus. Vraiment, la surprise que l'on n'attendait pas. On notera par contre que leur version live de "Crystalised" est chiante comme la mort.

Willis Earl Beal
Figurez vous un black avec une super voix, habillé comme dans un clip des années 80 avec ses mitaines en cuir, son gros ceinturon brillant et son tee shirt rentré, s'enfilant une bouteille de Jack Daniels le temps d'un set. Voilà, c'était Willis Earl Beal sur la petite Scène de la Tour. Et ce n'était pas plus marquant que cela. Paraît que c'est la relève du blues. 

Mark Lanegan ne m'a pas plus touchée. Il aurait peut être fallu que je me penche un peu plus sur la discographie de ce type qui ressemble à un vieux trucker pour réussir à m'intéresser au concert.
Breton
Il y avait encore une foule compacte pour le dernier concert de la soirée. Des rumeurs continuent de circuler comme quoi Breton en concert est quelque chose d'énorme. Je n'y crois toujours pas. Comme aux Transmusicales dernières, leur set était ok. Ils ont beau pas mal parler entre les chansons grâce à leur chanteur bilingue, et avoir mis les formes en proposant des vidéos sur les écrans des côtés (qui sont d'ailleurs vraiment laides), ça ne prend pas. Il y a un je-ne-sais-quoi qui ne marche pas. Peut être que c'est simplement leurs chansons dites hybrides, pas si révolutionnaires que l'on veut nous faire croire.


dimanche

Dimanche, le programme était nettement plus light ; beaucoup de légendes qui ont ravi les fans, sans vraiment passionner les autres.

C'est ainsi qu'on a vaguement regardé sans jamais réussir à rentrer dedans les concerts de Stephen Malkmus & The Jicks (où les fans sont ressortis en-chan-tés tandis que les amateurs de Pavement étaient un peu déçus parce que, forcément, c'est différent), Mazzy Star (vraiment trop doux) et The Walkmen (tellement assommants qu'on a préféré partir et louper Hanni El Khatib qui, de toute manière n'était pas enchanteur aux Eurockéennes)

Chromatics en revanche, c'était mieux. Leur choix de setlist était un peu discutable, ils avaient des morceaux bien plus efficaces qui auraient mérités d'être joués, mais on peut comprendre qu'ils veuillent faire la promotion de leur nouvel album. Ils ont commencé par "Tick Of The Clock", histoire de faire plaisir aux gens qui ont vu Drive (90% du public sûrement) pour terminer sur leur belle cover de Neil Young. Tandis que la chanteuse se met tout le monde dans sa poche avec sa voix, ses yeux de chats et ses talons de dix centimètres, le reste du groupe se fait discret et joue comme sur CD. Pas une claque, mais un beau moment tout de même.
Et pour terminer le festival, rien ne vaut un ovni dont on se souviendra. Colin Stetson et sa faculté à souffler dans ses instruments à cuivre pour émettre des sons étranges qui ressemblent parfois au chant des baleines a impressionné, sur la Scène de la Tour. Il a beau prévenu qu'il avait beau avoir la grippe, on a trouvé sa performance technique impeccable.

Alors oui, la Route du Rock 2012 était très bonne. Et même si la qualité des concerts a baissé au fur et à mesure, on a toujours réussi à y trouver son compte. En plus,je n'ai même pas eu à sortir mon K-way de tout le week-end. Vous avez vraiment besoin de vingt-deux bonnes raisons pour prévoir d'y aller l'année prochaine ?